vendredi 20 novembre 2015

une fille en colère

Cela fait un peu moins d'une semaine que les mots trottent dans ma tête, des mots plus ou moins ordonnés, plus ou moins censés ...

Je suis passée par tous les stades.

L'énervement : 

J'étais à Lyon en weekend avec mes enfants au restaurant quand les attentats ont eu lieu. Le lendemain, nous devions aller à l'agence immobilière pour signer le bail pour notre futur chez nous et faire visiter ce lieu à nos enfants afin qu'ils puissent visualiser le déménagement et tout ce qui va aller avec.
J'étais fatiguée. 4h de route en fin de journée, enceinte de 7 mois, l'idée de refaire ça le lendemain m'épuise d'avance d'autant plus que j'avais fait la même chose sur une journée 15 petits jours auparavant.

J'étais énervée car le réseau ne fonctionnait pas super bien dans le restaurant de l'hôtel et du coup, les réseaux sociaux ne se mettaient pas à jour. Les statuts ont commencé à fleurir, à s'amplifier, à faire peur.
Je parlais en langage codé avec mon mari pour ne pas que les enfants comprennent et ne s'inquiètent sans raison. J'essayais tant bien que mal de me connecter à des sites d'informations. Le "sans raison" a vite été remplacé par l'horreur de l'évènement.

Je ne rentrerai pas dans les détails de l'horreur, nous les avons tous vus/entendus.

L'incompréhension : 

Dans un premier temps, où ? qui ? comment ? et surtout pourquoi ?
Quand j'ai su qui, je n'avais pas besoin de pourquoi parce qu'il n'y a aucune raison valable à ce qu'ils ont fait.

La peur : 

Je ne connais pas grand monde sur Paris mais j'en connais et s'il y a des gens que je connais qui sont touchés/tués. Comment faire face ?
Je reste sur Facebook qui a mis en place une petite application pour signaler que les gens vont bien. Je suis rassurée un peu sur mes amis. Un peu, les autres, je ne les connais pas. Je ne sais pas qui ils sont mais ils ne sont plus, ils ont connus l'horreur.

La culpabilité : 

Oui, je me suis sentie coupable. Coupable de vivre en province, loin de tout, loin de cette haine, loin de ces amalgames. Coupable de vivre dans une petite ville où la religion n'est pas le premier sujet dont on parle. Coupable de me dire que je suis ravie de vivre en province, loin d'être une cible pour mes enfants.
Et surtout coupable, car heureuse de ne pas avoir choisi de vivre à Paris lors de la mutation de J.

La tristesse : 

Des gens ont été tués, exécutés par des monstres sans coeur avec une idéologie refusée par la majorité du monde. Oui du monde, parce que finalement, ils ne sont qu'une poignée par rapport aux autres, nous qui réfléchissons avant d'agir, de parler.

Et c'est que le dernier stade a commencé à se mettre en place.

La colère : 

Depuis que je suis petite, ma maman m'a toujours dit qu'on ne récoltait que ce que l'on semait. Si tu veux que les autres soient gentils avec toi, il faut aussi que tu sois gentille envers eux.
Je suis pas méchante. J'essaie toujours de trouver le bien chez les gens et quand il y a un conflit, j'essaie de comprendre les deux cotés de la balance.
Finalement, plus je grandis, plus je me rend compte que c'est une version Bisounours. 

Qu'ont-ils fait ces gens pour récolter la mort ? 

Je ne sais pas et je ne le saurai jamais. Ou plus exactement, je ne le comprendrais JAMAIS.

Aucun acte ne justifie ce qui a été orchestré, la peur et le chagrin que ça a généré.

J'ai vu des élans de soutien du monde entier comme on a pu en voir après les attentats contre Charlie Hebdo.

Sauf que voilà, je suis en colère et je ne décolère pas. 

Pour plusieurs raisons : 

 - il n'y a pas qu'à Paris que les horreurs ont eu lieu. Il s'en passe partout dans le monde depuis des décennies mais voilà on a touché à un symbole de la liberté alors maintenant faut réagir... Donc non, je ne suis pas Charlie, je ne suis pas Paris. Je suis moi et je suis humaine et pour le monde entier.
- Sous couverts de discours qu'il ne faut pas avoir peur et de continuer à vivre, on fait culpabiliser ceux qui ont peur. Personnellement, oui j'ai peur et à choisir entre attendre un peu et vivre et provoquer et mourir, je prends la première option. J'avais notamment prévu d'aller à un évènement dans une semaine, j'y avais mis des réserves du fait de ma grossesse. J'ai déjà dû abandonner un concert auquel je tenais. Je préférais me méfier.
La décision a été prise par J. La situation n'est pas idéale et il ne faut pas se leurrer, Noël approchant à grand pas les répliques peuvent encore être présente. Je ne veux pas être pessimiste juste réaliste. Non je ne dis pas qu'il faut s'arrêter de vivre et ne plus sortir. Je continue simplement de vivre ma vie comme elle était.

Mais ce qui me met le plus en colère, c'est de constater que l'élan d'humanité et de générosité a vite été oublié sur les réseaux sociaux.
Tous les ans, à la même période, il y a toujours les mêmes guéguerres sur les réseaux sociaux dans les différentes sphères des blogs. Étant plus présente, sur la blogosphère parentale, c'est surtout celle-là que je vois.
Il est triste de constater que malgré les évènements récents, cela continue à croire que l'être humain n'apprend pas ou à court terme.

Les réseaux sociaux font ressentir le pire comme le meilleur chez nous, l'égocentrisme permanent étant protégé derrière nos écrans (et claviers), on peut dire ce qu'on veut sans en voir les conséquences. Il ne faut pas oublier qu'il y a des gens entre le clavier et la chaise et ces gens même à travers la toile, les mots mal interprétés peuvent faire mal. 
On a le meilleur aussi, des élans de solidarité pour des familles dans le besoin qui, sans les réseaux sociaux, resteraient dans le besoin dans l'anonymat total. Des amitiés se créent et perdurent.
C'est beau surtout si on vit dans le pays des bisounours.

Malheureusement, on n'en voit pas souvent ou alors je ne fréquente pas les bonnes personnes.

Pour en revenir à ma maman, je constate malheureusement qu'on récolte plus souvent l'indifférence et l'ignorance face à la gentillesse.
Face à tout ça, je me dis à quoi bon ... 

J'aimerai avoir à nouveau foi en la bonté des gens et en l'humanité.

Je vais prendre le temps. Un temps pour moi, avec tous les changements qui se profilent m'en prendre plein la tête pour rien, je ne vois pas l'intérêt. Un temps pour mon petit serpent de mer qui doit arriver d'ici un mois et demi et me concentrer sur tout l'amour que je vais lui apporter et à son innocence qui me rappellera que la vie est belle finalement.

Car oui la vie est belle.


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